On pense d'emblée à 1984 
                  d'Orwell (la toute première scène !) et, forcément 
                  à Fahrenheit 451 
                  ou encore THX 1138. 
                  Et cette impression ne nous quitera plus, hélas... 
                  Ici ce sont les émotions que l'on brûle au pilori, 
                  ainsi que tout ce qui les suscite (notamment les arts), et l'on 
                  retrouve toutes les caractéristiques des sociétés 
                  fascistes dans Libria : un monde policée, militarisé, 
                  le culte de la personnalité associé au Big Brother 
                  (le Père), la destruction du savoir et des libertés, 
                  ...etc. Le film est une charge contre une certaine forme d'idéalisme 
                  et de bonheur : éradiquer chimiquement les émotions 
                  pour éradiquer sa violence naturelle de l'être 
                  humain et, ainsi, rendre les hommes libres puisque pacifiques. 
                  Libres ? Sans émotions nous ne serions pourtant que de 
                  vulgaires machines, des robots, des automates esclaves de nos 
                  dirigeants, de simples animaux à qui l'on aurait ôté 
                  une raison essentielle d'exister, d'être. Dans un monde 
                  faussement idéal, sans guerre ni haine, sans "violence" 
                  (seulement celle de l'Etat), l'homme peut-il être réellement 
                  heureux ? Les émotions font-elles de lui un être 
                  à part qui le différencie des animaux ? Ou est-ce 
                  le contrôle de ces mêmes émotions qui en 
                  font un homo erectus, un être plus évolué 
                  que les autres ? Le prix de la liberté individuelle serait 
                  pourtant celui du sang, de la haine et de la destruction par 
                  une poignée d'êtres sans auto-contrôle de 
                  leurs basses émotions. 
                  C'est une bonne et intelligente réflexion, mais on l'a 
                  déjà vu, déjà entendu et le film 
                  ne parvient pas à sortir du giron de ses illustres modèles 
                  : la faute à une thèse certainement trop scolaire 
                  et artificiellement appliquée ; c'est une explication 
                  de texte plus qu'un film à part entière et on 
                  se rend compte que, concernant cette violence inhérente 
                  à l'homme / à l'Etat, Orange 
                  mécanique  avait déjà plié 
                  le game. Peut-être que le scénario aurait du interroger 
                  plus en avant, et plus frontalement, profondément, l'utilité 
                  de l'art dans nos sociétés modernes ? On est d'autant 
                  plus déçu que -même si cela fonctionne à 
                  peu près- ses faux airs de Matrix 
                  (les combats !) nuisent au sérieux du discours... 
                  Equilibrium  : une oeuvre coincée entre 
                  combats matrixiens et idéologie orwellienne.
                NOTE : 10-11 / 20