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Interview

David MOREAU, réalisateur de Seuls & 20 ans d'écart

- Bonjour David et merci de me consacrer du temps. Peux-tu te présenter en quelques mots : comment es-tu devenu réalisateur ?

Peut-être une envie de faire peur à mon entourage depuis ma plus tendre enfance. Gamin, je construisais des trains fantômes, des maisons de l’horreur pour mes copains. Alors pourquoi pas ne pas en faire un métier ?! J’ai fait plein de petits boulots dans le cinéma, réalisé pas mal de court-métrages heureusement aujourd'hui introuvables, puis ma rencontre avec Xavier Palud a été décisive. Ensemble on a écrit un petit film, Ils et ensemble on l’a envoyé par la Poste à un producteur (Richard Grandpierre) qui nous a miraculeusement fait confiance.
Je me souviens encore de notre premier coup de fil… « Bon faut réécrire le début. Puis la fin. Mais y’a trente pages qui m’empêchent de dormir alors
allons-y ! ».

 

- Que retiens-tu de ton expérience américaine ? Si c'était à refaire...?

Génial et terrible. Les Etats-Unis… « Ô terre de contraste ». Sûrement trop « verts », Xavier et moi n’avions pas assez d’expérience en politique. On n’avait pas vraiment compris que tout le paradigme était différent. Là-bas, la loi du copyright est reine et donc les auteurs doivent se battre pour
avoir la légitimité d’être « en contrôle total ». Tout l’équilibre est différent. Puis je crois qu’on s’est pas vraiment compris avec nos producteurs sur le film qu’on voulait faire, et ça, quelque soit notre culture ou notre nationalité, ça peut pas marcher.
J’ai toujours un agent là-bas, et je reçois toujours des scénarios mais je dois avouer que le cinéma américain me fait moins rêver qu’avant. Je préfère développer des films en langue anglaise avec des producteurs européens et garder le contrôle artistique que de tout risquer là-bas. Maintenant si on me propose un projet génial, bien sûr j’y retourne dans la seconde.

 

- Tu as réalisé tes 2 premiers films avec X. Palud : comment se répartit le travail sur un tournage ?

En gros, on prenait toutes les décisions artistiques de concert ; sur le plateau, peut-être, j’étais plus avec les comédiens et Xavier avec la caméra. Mais il n’y avait pas une franche séparation des tâches.



- Est-il de plus en plus difficile de produire et distribuer un film de genre en France ?

Bien sûr. Ce n’est pas ici une économie viable. Malheureusement, peu de films français de genre ont rencontré leur public. Mais pas mal de projets français en langue anglaise sont en train de voir le jour. En anglais, ils ont beaucoup plus de valeur à l’international et donc beaucoup plus de chance d’être financés.

 

 

- Justement : il semble exister un plafond de verre en terme de box office pour les productions fantastiques locales (Dans la brume ou Seuls sont restés sous la barre des 400 000 entrées) ; d'où vient ce manque de curiosité du public ? ?

Bien que nous ayons moins d’argent pour faire et surtout marketer nos films, je pense que le problème est que le public français a du mal à croire à ce genre d’histoires lorsqu’elles se déroulent dans leur réalité, avec des acteurs qu’ils ont vu dans des comédies ou des drames sociaux. L’exotisme des USA est une sorte de porte d’entrée vers un autre imaginaire.
Et puis peut-être avons nous longtemps eu une sorte de complexe d’infériorité face aux américains. En reprenant des thèmes surexploités aux US pour les faire « à la française ». Nous nous devons d’être plus originaux qu’eux. Et je pense qu’il y a dans notre patrimoine et notre histoire, plein de sujets propices à être traités dans le genre. C’est là, je pense, que réside notre richesse.

 

- Pourquoi les films français ne fonctionnent pas aux USA, à l'exception de certaines productions Europacorp ?

Parce qu’ils sont en français. Les américains préfèrent refaire en anglais plutôt que de se cogner des sous-titres. Les titres d’Europacorp ayant eu une grosse carrière à l’inter ont tous, de mémoire, été tournés en anglais.
(Je confirme)

 

- Tu as surpris ton monde avec 20 ans d'écart : comment es-tu arrivé sur ce projet ? Etait-ce pour casser le risque d'être étiqueté "réalisateur de films d'horreur" ?

Pas de plan de carrière. Vraiment j’aime autant les comédies que les films d’horreur. Et je n’envisage pas différemment mon métier dans un genre ou dans un autre. Pour moi la place de la caméra, du son, de la musique a autant sa place dans une scène de baisers que dans une scène de décapitation. Tiens hier, j’ai revu Les nuits de la pleine Lune de Rohmer et enchaîné avec le remake très réussi de Dawn of the Dead de Zack Snyder. Et bien je crois que j’aime autant les deux. D’ailleurs pourquoi ne pas envisager un cross-over… :-)
(Chiche !)

 

- On a beaucoup évoqué récemment le fait de pouvoir bouleverser la chronologie des médias : ça te semble judicieux ?

Les modes de « consommation d’images » changent à une vitesse de malade mental. Bon, moi j’avoue être un peu old school. Besoin de voir les films sur un grand écran (en ce moment c'est un peu compliqué...). Et j’avoue être pour préserver au cinéma son caractère « exceptionnel » en lui garantissant son couloir d’exclusivité de trois mois (Avec dérogation, sinon le délai reste de 4 mois). Même si je ne suis pas contre le fait que Netflix ou autres plateformes puissent distribuer leurs productions en même temps en salles. (Mais c'est tellement dommage de ne pas voir Irishman ou Roma sur un écran de 15 mètres de large).

 

 

- Après plusieurs années de silence, que nous prépares-tu actuellement ?

J’ai commencé le tournage de mon prochain film KING, un film d’aventure assez dingue avec deux ados qui trouvent un lionceau dans leur jardin et qui ont l’idée saugrenue de le ramener en Afrique envers et contre tous. Monsieur Corona est venu bouleverser notre calendrier mais nous allons reprendre les prises de vue très vite, je l’espère. Puis j’enchaîne avec un film fantastique qui me tient très à coeur produit par Jean des Fôrets qui nous avait apporté le magnifique Grave en 2017.

 

- Tes influences majeures en matière de cinéma viennent de quels auteurs ?

Disons que ceux qui m'ont le plus marqué et donc, par essence, conséquence, fortement inspirés furent sans aucun doute (dans le désordre alphabétique et de préférence) D. Lynch, B. De Palma, B. Wilder, R. Wise, S. Spielberg, D. Cronenberg. Sans oublier ma fascination pour Blake Edwards.

 

- Si tu devais choisir un film sorti ces dernières années et que tu aurais rêvé réaliser, ce serait lequel ?

J’ai été très impressionné par The strangers de Na Hong-jin. Très impressionné. Ah ? 4 ans déjà !

 

- Au fait : que devient Xavier Palud ?

Xavier travaille à l’écriture de plusieurs films dont un absolument génial que j’ai hâte de voir.

 

- Merci encore David, belle continuation à toi et bravo pour cette carrière déjà très éclectique !

Merci à vous et continuez hein, je suis accro à votre site !