Il y a trois principales formes de cinéma : celui qui est "spectaculaire" et celui qui est ambitieux. La troisième forme est beaucoup plus rare et complexe puisqu'elle réunit ces deux précédentes formes. Sur les chemins noirs se prêtait à cette troisième forme.
Un écrivain et aventurier victime d'un grave accident, manquant de l'empêcher de marcher à nouveau, mesure la chance qu'il lui est donné lorsqu'il se remet debout et se lance dans une marche-littéraire à travers la France.
Inspiré du récit et de la vie de Sylvain Tesson, D. Imbert nous propose un voyage philosophique, tout du moins réflexif sur la France rurale, invisible, délaissée et sauvage, naturelle et surtout réduite à sa plus simple expression, c'est à dire loin du vaste fracas inutile des cités.
Métaphore palpable et probante de cette existence qui devrait sans nul doute emprunter plus souvent des chemins de traverse -et quelques chemins noirs- Sur les chemins noirs nous invite à un voyage rédempteur où l'homme tire un trait sur son passé, ses fautes, ses démons, ceux qui ont failli détruire tout ce qu'il aimait de la vie. Une œuvre traversée de mots sublimes et profonds (mais Walden de H. D. Thoreau est deux fois plus épais !), résonnant toujours de façon puissante pour qui aime à voir plus loin que le bout de son nez. Mais malheureusement jamais sublimés.
Car on regrettera les images anodines cachées derrière quelques beaux plans naturels, une réalisation sans point de vue et un film agréable, qui me parle vivement à différents points de vue, mais qui refuse catégoriquement le spectacle (et je ne parle pas d'effets ou de scènes d'action) et limite sa propre ambition par son côté biopic aux séquences trop invasives, dont l'intrigue lui tourne continuellement autour ("comment a-t-il été accidenté ?), trop introspectif et ne s'ouvrant pas assez franchement sur une méditation plus ouverte, intense et poussée.
