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La nuit du chasseur
Charles LAUGHTON
Budget = 0,795 M$
BOX OFFICE France = - / ? - ? - 286 000 entrées
BOX OFFICE USA = - M$
BOX OFFICE Monde = - M$
 

Le Mal incarné. L'innocence imagée.
"Hate" : un faux prêtre assassine ceux qui n'entrent pas dans les canons de la Sainte Bible. Et les veuves.
"Love" : deux jeunes enfants emportés tant bien que mal dans le tourbillon d'une vie agitée par la grande pauvreté et tout ce qu'elle engendre.
Il fallait oser ce grand écart cinématographique dans les années 50, il fallait entreprendre ce genre (le thriller, mais pas n'importe quelle thriller...), il fallait envisager cette thématique religieuse, il fallait produire ce film au style sans commune mesure. On imagine à quel point ce devait être une oeuvre dure pour l'époque (pas sortie aux USA ?), le piège se refermant violemment sur deux pauvres enfants, ne les épargnant jamais, l'homme de Dieu incarnant le Mal à l'état pur dans une société profondément religieuse. C'est également une réflexion sur le pouvoir malfaisant de l'argent, la pauvreté dans un contexte historique difficile. La lutte éternelle du Mal contre le Bien ou quand l'expression "La beauté du Diable" n'a jamais été aussi bien interprétée.
Mais développons un peu.
Ce qui surprend de prime abord dans ce film c'est que l'histoire n'est absolument pas racontée de manière classique, linéaire, et on ne sait encore trop qui en sera le héros. Il y a ensuite, et constamment, un parfum de souffre qui souffle sur le scénario : depuis la description de ces mauvaises gens (le père -excusable-, le pasteur) jusqu'au coeur de ces histoires de foi excessive. Il y a également une multiplication des personnages (le véritable héros s'avèrera être un enfant) et surtout des points de vue ; les enfants sont ici les détenteurs d'une vérité trop lourde pour leurs fragiles épaules, les adultes restant aveuglés par le costume de ce bonimenteur hypocrite, pervers et dangereux.
Vous le comprendrez aisément : La nuit du chasseur est un film d'une immense richesse, au scénario quasi métaphorique et possédant divers niveaux de lecture dont le plus moderne pourrait très bien s'apparenter à une réflexion sur l'extrémisme religieux : le personnage principal n'est qu'un usurpateur, paré d'une solide coquille pseudo-religieuse dont il se sert pour commettre le pire (le meurtre, l'enrichissement par tous les moyens...etc) ; contrebalancé bien évidemment par la vieille dame de la fin qui devient la représentation, l'essence même de la religion (donner son temps aux orphelins, protéger les pauvres et les innocents,...etc).
Dans cette Nuit du chasseur la violence du récit heurte inévitablement le spectateur : la force de l'âge adulte contre la faiblesse de l'enfance, l'intelligence et l'expérience contre l'immaturité et la naïveté (l'adolescente attirée par cette incarnation du Mal), le machiavélisme contre la candeur. A noter également l'utilisation d'un autre symbole fort de l'innocence : les animaux. Ce Mal, qui plus est, prend le visage d'un Robert Mitchum totalement imbibé par son rôle, pour un suspens diablement efficace et des séquences extrêmement tendues. Sans oublier cette chanson presque obsessionnelle, proprement divine.
Et puis, bien sûr, ce que l'on garde gravé en nos mémoires, ce qui fait définitivement basculer le film dans le domaine du chef-d'oeuvre, c'est le travail de C. Laughton, unique incursion dans ce domaine de la part de ce fameux acteur. Un véritable travail de peintre basé sur la profondeur de champ, les ombres sans cesse portées et la beauté significative des images ; images dont la photographie flamboyante participe à cette ambiance inquiétante et menaçante. Aidé de ces lumières et de ces ombres jouant avec le noir et blanc, de cette caméra en perpétuelle recherche et de la beauté et du sens. Il y a des plans nocturnes de toute beauté, d'une beauté formelle rarement égalée : les scènes crépusculaires sur le lac sont proprement extraordinaires, notamment grâce à l'emploi de contre-jour et l'utilisation judicieuse des décors.
On ne vous a jamais aussi bien raconté l'histoire du Bien et du Mal. A la fois effrayant et envoûtant : j'emmettrai seulement certaines réserves sur le jeu de S. Winters...

NOTE : 19-20 / 20

La critique des internautes
 

 

NOTE : - /20

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