(Ne pas lire si vous n'avez pas vu le film !) Voici un petit miracle cinématographique, une oeuvre à hauteur d'homme, anti-thèse du manichéisme ambiant, qui n'a qu'un seul but : rappeller à l'homme combien il est imparfait. Quelques part entre Altman et Inarritu, le scénario est un enchevètrement maitrisé d'histoires concernant des habitants de Los Angeles, des histoires qui se répondent toutes plus ou moins, qui s'entrechoquent fréquemment, qui s'éclairent les une, les autres, qui se contre-balancent savamment, des histoires crues et parfois dures mais tellement humaines, tellement sensibles. Elles sont les miroirs de l'espèce humaine, vu à travers le prisme de la coexistence culturelle dans notre communauté, entre racisme et préjugés quotidiens où, finallement, il n'y a plus ni noir, ni blanc, ni jaune, ni marron, mais des gens socialement conditionnés à haïr son prochain, à l'aimer, et vice et versa. Mais toute l'intelligence du film réside dans ces magnifiques scènes, contre-poids fabuleux qui nous entraine dans la mise en balance de nos propres préjugés vis à vis des personnages : le mexicain vu comme un voleur est le plus merveilleux des pères, les noirs victimes de "ségrégation" sont de vulgaires voleurs de voitures (et ça, c'est osé...) qui finiront de façon plus ou moins injuste, le bon flic non-raciste sera l'assassin d'un black qui aura le malheur de mettre une main dans sa poche, le flic raciste sauvera sa victime au péril de sa vie...etc. Au travers de scènes formidablement émouvantes (notamment celle de la gamine, qui joue encore sur nos a priori...) cette oeuvre très justement oscarisée est en fait le Ying et le Yang de l'espèce humaine, entre lâcheté et bonté sans faille, caractère excessif, impulsif et brillant recul, cette parenthèse dans la vie de L.A. nous en dit long sur nous-même et nos semblables. Notons la musique justement angélique qui sied si bien à la ville des anges... un décor choisi à bon escient.