La principale et grande qualité de ce film est de nous 
                  surprendre en refusant de se plier bêtement à une 
                  lecture littérale de l'oeuvre, mais plutôt en construisant 
                  une histoire autour, pour en retirer la substantifique moelle 
                  ; ou tout du moins une partie, vu la richesse immense du matériau 
                  d'origine. C'est donc l'histoire d'une petite fille dont la 
                  vie est minutieusement programmée par sa mère 
                  (et sans doute par son père affreusement absent, modèle 
                  "fantôme"), carrée, ordonnée, 
                  régi par le temps et où il n'y a aucune place 
                  pour une quelconque ouverture sur l'extérieur, notamment 
                  pour l'amitié. Et c'est cette amitié qui nous 
                  est narrée : celle qui nait avec le voisin, viellard 
                  ubuesque, fameux aviateur et ami du petit prince. Voici un regard 
                  moderne sur l'oeuvre absolument géniale de A. de St Exupéry 
                  : deux mondes, deux générations et techniquement 
                  deux modes d'animation ; des liens entre les mondes relient 
                  les histoires textuellement en les délayant joyeusement. 
                  Car tout part d'une vie ennuyeuse ou l'amour n'épanouit 
                  pas le héros (celui de la rose / celui de la mère), 
                  d'un voyage initiatique pour éveiller sa conscience, 
                  de séparations et de retrouvailles. Un développement 
                  tout azimuth et radicalement évolutif qui relègue 
                  toute forme d'ennui ou d'impression de déjà vu, 
                  une oeuvre à la beauté picturale aussi rare qu'originale, 
                  originalité qui vient d'une fausse confrontation entre 
                  animation traditionnelle (aussi beau que le travail des studios 
                  Aardman) et numérique (costaud comme les américains). 
                  Sur le fond le film rend hommage à ce que St Exupéry 
                  nous a laissé : un monde adulte qui possède une 
                  trop forte propension à l'oubli, un univers froid où 
                  tout semble tourné autour de la possession (la fausse 
                  richesse, pas celle du coeur), la réussite relative (cette 
                  mère qui croise quelque minutes par jour son enfant et 
                  ne croise jamais son mari, a-t-elle vraiment réussi sa 
                  vie de famille ???), le pouvoir, l'utilitarisme pour un bien-être 
                  tout relatif, le bienfait illusoire du travail lorsque l'on 
                  vit pour travailler, et enfin l'absence cruelle de rêves, 
                  d'émerveillement (ici et métaphoriquement : les 
                  étoiles). Une vieille histoire, complexe et très 
                  bien racontée, qui a le mérite de surprendre sans 
                  pour autant atteindre la perfection. Le doux prolongement d'un 
                  chef-d'oeuvre qui continue de nous supplier de ne pas oublier 
                  et de ne bien vouloir ne voir qu'avec le coeur. Combien de spectateurs 
                  auront pourtant oublier tout cela sitôt sortis de la salle 
                  ???
                NOTE : 13-14 / 20